Une entreprise étrangère est-elle responsable pénalement en France ? Retour sur l’affaire Ryanair

Une entreprise étrangère est-elle responsable pénalement en France ? Retour sur l’affaire Ryanair

Tom Bonnifay I Revue Lexbase Pénal I 21.11.2023

L’affaire Ryanair remonte à 2006. La compagnie irlandaise s’implante à l’aéroport de Marseille-Provence. Elle dispose de 4 avions, de locaux sur place et de personnel. Son bénéfice n’est pas négligeable : 569 millions d’euros pour la seule année 2012.

Puis, deux syndicats de pilotes et de personnel naviguant déposent plainte contre Ryanair. Une caisse de retraite porte également plainte. L’Office central de lutte contre le travail illégal (OCLTI) et la brigade de gendarmerie des transports aériens Sud mènent l’enquête préliminaire. Ils reprochent à Ryanair d’avoir exercé son activité en France sans appliquer la législation française du travail.

En effet, Ryanair n’a pas créé de comité d’entreprise (CE) ni de comité d’hygiène de santé et des conditions de travail (CHSCT). La compagnie n’a pas non plus respecté la représentation du personnel et l’exercice du droit syndical.

Mise en examen, Ryanair mandate un salarié pour répondre aux questions du juge d’instruction. Il explique que toutes les décisions étaient prises à Dublin, aucune en France. Il conteste l’ensemble des infractions. Selon lui, Ryanair est soumise au droit irlandais, tant du point de vue administratif et commercial que du point de vue de la législation sociale.

Les juges ne parvenaient pas à identifier l’organe ou le représentant officiel de Ryanair en France. En effet, plusieurs mois avant l’enquête, Ryanair répondait à l’inspecteur du travail : « we do not have any representative management or administrative function at Marignan » / « nous n’avons aucune fonction administrative ni aucun représentant légal à Marignane ».

Le tribunal correctionnel pouvait-il condamner Ryanair sans identifier la personne physique responsable de Ryanair sur le sol français ?

Dans son arrêt du 17 octobre 2023 (n°22-84.021), la Cour de cassation répond par l’affirmative. Ryanair engage ainsi sa responsabilité pénale parce que cette société a fait délibérément écran à toute identification du véritable décideur.

Nul ne peut se prévaloir de sa propre turpitude.

Retrouvez les détails de cette décision et ses implications dans l’article de Tom Bonnifay paru dans la revue Lexbase Pénal en novembre 2023 :

17/11/2023